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l'objet conséquences

Revue conséquences (1983-1991), 16 numéros

 le magazine des objets réfléchis (à partir du n°10)

(Éditorial n°1)

Conséquences, mais de quoi ?

 

Devant la diversité des pratiques envisagées (la littérature, mais aussi la bande dessinée, la musique ou la mode), devant la variété des approches utilisées (ici quelques lignes d’une fiction sont minutieusement analysées, là le dispositif télévisuel dans son ensemble se trouve interrogé), certains se feront l’idée d’un arbitraire souverain, d’un éclectisme très libéral, voire d’un œcuménisme de bon aloi.

Tout autre est pourtant notre démarche.

Ce qui assure à cette multiplicité sa cohérence, c’est d’abord l’attention obstinément portée à la spécificité des objets tour à tour pris en compte : chacun d’eux met en jeu une matière, chacun d’eux dispose de divers moyens pour la transformer. Aussi n’est-ce pas en fonction de l’appartenance de ces objets à un genre ou à un autre que l’intérêt se focalisera sur eux, mais plutôt en raison de l’aptitude d’un travail à tirer parti de cette spécificité.

Voisineront donc dans ces pages aussi bien des sujets culturellement valorisés que d’autres ordinairement perçus comme futiles. Il des antiquités qui méritent mieux que leur réputation. Il est des « vidéo-clips » plus élaborés que nombre d’œuvres consacrées. Au gré de ces rapprochements, des correspondances peut-être inattendues se feront jour : il se pourrait bien que la production d’un Mallarmé rencontre davantage d’échos, sous certains aspects, chez tel romancier de science-fiction que chez maints poètes aujourd’hui encensés.

Ce qui assure à cette multiplicité sa cohérence, c’est aussi l’ancrage constant des analyses, même les plus aventureuses, dans une pratique réellement menée. Loin d’une attitude, presque philosophique, qui prétendrait coiffer de ses concepts des activités dont elle se dispense, c’est à partir d’une expérience effective que chaque domaine se verra exploré.

Car une pratique est nécessaire : sans référence à un lieu concret, rien d’important ne peut survenir. Mais une pratique, en soi, n’a pas de vertus magiques: la faire fructifier suppose qu’elle se montre sensible au matériau qu’elle rencontre, à ses résistances et à ses sollicitations. L’intelligence qu’alors elle aura d’elle-même l’autorisera, ouvrant de possibles comparaisons, à saisir le fonctionnement d’autres activités. Ainsi est-il apparu à cette revue que le travail d’un Ricardou s’avérait efficace bien au-delà du seul Nouveau Roman et de la seule théorie littéraire.

Ce qui assure à cette multiplicité sa cohérence, c’est enfin le souci de tout ce qui, dans ces pratiques, porte à conséquences. À se pencher attentivement sur certains détails, si ténus qu’ils paraissent d’abord, on met souvent le doigt sur quelque chose d’un peu moins anodin. De caractère simplement technique à première vue, une analyse se montrera finalement apte à formuler des hypothèses pour le quotidien même.

Quant à préciser davantage la nature de ces conséquences, il ne serait guère conséquent, on le comprend, de s’y risquer maintenant. De numéro en numéro, c’est un savoir à mesure qui devrait s’élaborer ; un savoir par lequel la revue elle-même a toutes les chances de se trouver transformée.

Patientes donc, mais aussi résolues, ces Conséquences s’efforceront d’obtenir, progressivement, les conditions d’une reprise de la pensée, aujourd’hui, plus que jamais, nécessaire.

 

 

(Éditorial n°2, phrase manifeste)

Les frontières séparent moins des domaines que des fonctionnements.

Comité de rédaction :

Marc Avelot, Jan Baetens, Mireille Calle-Gruber,

José Calvelo, Michel Falempin, Daniel Fleury,

Michel Gauthier, Patrice Hamel, John Lee,

Guy Lelong, Benoît Peeters

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